Il existe dans l'art africain une légende remarquable relatif à ces objets, celle ci est racontée par Philippe DOUSSIN.
C'était il y a très longtemps. A l'époque où le ciel était proche de la terre, si proche que, le soir, les mères décrochaient les étoiles pour que les enfants jouent avec avant de s'endormir.Au début du cycle de la présente humanité, les hommes savaient se mettre sans aucune peine (car le Ciel et la Terre sont proches « de l’homme ») en contact avec le domaine métaphysique (le ciel), car ils n’étaient en rien différents de l’homme primordial (l’état édénique, appelé généralement dans tous les peuples traditionnels « l’ancêtre ») en lien permanent avec l’Être (et le Principe Suprême).Les enfants naissaient déjà dans cet état, et toutes les possibilités spirituelles (les étoiles) leurs étaient si aisément accessibles qu’ils en jouaient.
A cette époque, donc, brillaient 10 soleils au firmament. La lumière spirituelle était diffusée (donc leur appartenait intimement) par tous les êtres (dans la tradition extrême-orientale 10 est défini comme le nombre qui contient tous les autres nombres et par extension est le symbole de la totalité cosmique), mais cette multitude n’était qu’apparente et était finalement contenue indistinctement dans le firmament.Un jour, un chasseur aussi impudent qu'adroit, tira des flèches sur ces soleils. L’être devenu chasseur, c'est-à-dire descendu au niveau de l’individualité, usa de l’espace et du temps (la flèche en mouvement est un symbole pour désigner l’espace – la trajectoire – et le temps – la succession des positions. Elle est aussi un symbole de l’axe du monde, ce qui signifie que si l’homme tire une flèche vers le soleil - image du Principe dans la manifestation - c’est qu’il s’est éloigné de celui-ci).Les deux extraits ci-dessus peuvent être aussi traduits de la sorte : Les possibilités de manifestation contenues indistinctement dans le Principe, en se distinguant par la descente le long de l’axe du monde, donnent naissance à la multitude des êtres.Il en tua neuf, le dixième put échapper au massacre et s'enfuit pour se cacher.
Le Principe, par le sacrifice de son unité, donne vie aux êtres individualisés, mais il n’est pas atteint dans son intégrité par ce sacrifice puisqu’il reste toujours au moins un soleil. Ou si l’on prend encore un autre point de vue, la multiplicité ou la distinction n’est qu’apparente et lorsque l’on a tué toutes les distinctions il reste l’unité (un seul soleil) inaccessible et cachée aux yeux des profanes (ceux qui veulent rester comme le chasseur, c’est-à-dire à tirer des flèches, donc dans le monde de l’espace et du temps, de la forme).Alors la nuit s'installa. Et le froid. Sans soleil, les cultures dépérirent. On tue la distinction par le renoncement au monde de la forme, au monde de la manifestation qui se trouve sous le soleil. Ce qui est finalement une mort à ce monde et nécessite de passer au-delà du soleil.Les Hogons se réunirent, et adressèrent force prières et accomplirent de nombreux sacrifices pour supplier le soleil de réapparaître.
Pour passer au-delà du soleil et voir briller une autre lumière, il faut accomplir des actes conformes aux cycles cosmiques, ou conformes à ce que le Principe Suprême a accompli par son sacrifice pour faire naître la distinction. Il faut aussi tendre vers le domaine de la métaphysique par la concentration de toutes les modalités de son individualité (la prière). La supplication est une orientation délibérée de l’intention de l’individu vers le domaine spirituel. On peut voir aussi que la flèche tirée dans le soleil est le 7ème rayon solaire qui est la voie qui mène dans le domaine sub-solaire, et montre que si l’homme est descendu au stade de l’individu distinct du reste du monde, il peut aussi remonter vers les états supra-humains.Magnanime, celui-ci prit pitié des Hommes et accepta de revenir briller à nouveau. Si l’individu est qualifié, c’est à dire si ses possibilités propres le lui permettent (c’est ce qu’il faut entendre par « Magnanime » et «Pitié», qui indiquent que l’homme ne peut que se conformer au Principe qui lui donne forme qui est nécessairement hors de sa volonté propre et donc supra-humain), alors il retrouvera son état d’homme primordial, qui jadis lui était octroyé dès sa naissance.
Pour le remercier et commémorer cet évènement, et rappeler l'alliance passée avec l'astre du jour, un forgeron créa ce bijou, toujours porté par les Dogons en souvenir. L’art traditionnel est une voie (authentiquement initiatique) qui, par l’accomplissement d’une œuvre conforme au Principe (dont l’image dans notre monde est le Soleil) et le maintien du lien qui lui a été confié sous forme d’Influences Spirituelles (l’alliance) au moment où l’homme quitta l’éden, permet de retrouver l’état d’homme primordial.(Source: Philippe DOUSSIN)