Le débat sur la restitution des œuvres africaines est loin d’être clos. En effet, de nombreuses personnalités, hommes et femmes d’état, chercheurs, philosophes, professeurs ou gestionnaires de musées européens font encore régulièrement connaître leur avis sur la question.
En résumé, la situation :
En 2017, lors de sa visite à Ouagadougou (Burkina Faso), le président français Emmanuel Macron a exprimé, durant son discours, son désir de restituer les œuvres africaines détenues dans les musées français. C’est ensuite qu’il a confié à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr la précieuse tâche de rédiger un rapport concernant cette éventuelle restitution. Le compte-rendu, intitulé Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle éthique relationnelle » a déclenché un vif débat. L’objectif serait d’organiser la restitution en trois étapes, sur cinq années. Tout d’abord, vingt-cinq pièces seraient rendues immédiatement, ensuite, il s’agirait de faire l’inventaire des pièces : celles datant d’avant 1960 sont considérées comme ayant été obtenues illicitement. Enfin, envisager un dialogue entre les différentes parties prenantes.
Cependant, appliquer ces instructions est une tâche bien plus ardue. Il faut définir le terme « restituer » et à qui ? Quel pays, quel village, quelles personnes ? En outre, tous les pays ne disposent pas d’infrastructures adéquates pour recevoir une telle quantité de pièces. Bien que certains pays, tels que le Nigéria ou le Bénin (où 26 bronzes ont déjà été renvoyés) réclament le retour de ces œuvres dans leur pays d’origine, la décision de l’état français n’est encore ni claire ni définitive. Par ailleurs, l’Allemagne et les Pays-Bas ont déjà entamé les démarches de restitutions de certaines œuvres africaines présentes dans leur pays. A l’inverse de Londres ou Bruxelles, bien plus réticentes.
Certes, l’Afrique dispose de nombreux musées : à Abidjan, au Tchad, Ghana, Rwanda, à Dakar ou Bamako. Néanmoins, le directeur du musée du Congo affirme ne pas détenir de locaux adaptés pour recevoir ces pièces. Le musée en aurait déjà quelques 80 mille stockées dans de mauvaises conditions : par conséquent, la réception d’autres pièces venues d’Europe n’est, pour l’instant, pas sa priorité. Les conditions climatiques sont, également, des freins à la bonne conservation des œuvres : chaleur et humidité sont des facteurs d’influence.
Il est évident que la jeunesse, et même toute la population africaine, devrait pouvoir disposer d’infrastructures leur permettant d’accéder à la culture de leur pays et même à celle d’autres continents. En suivant ce raisonnement, Felwine Sarr explique à L’Express que la circulation, en Afrique et ailleurs, d’œuvres du patrimoine mondial serait nécessaire.
Rappelons qu’à l’origine et encore pour beaucoup d’africains, les pièces exposées dans les musées européens sont des objets cérémoniels et usuels, donc pas toujours à vocation artistique.
Certaines personnalités, telles que Stéphane Martin (président du musée du quai-Branly) ou Franck Riester (ministre français de la culture) optent pour l’alternative de la circulation des œuvres. Bien qu’elle soit coûteuse et qu’elle risque d’entrainer pertes ou endommagement des pièces.
Dans ce débat virulent, il est difficile de se faire un avis impartial. Une autre option envisageable serait alors d’établir une franchise, un pourcentage sur les entrées des musées ou la vente d’œuvres qui serait reversé au pays revendicateur de la pièce en question. Ceci dans la durée qu’il faudra pour que des infrastructures adéquates et adaptées aux conditions climatiques soient mises en place, et ce partout en Afrique.
Quoiqu’il en soit, il ne semble qu’aucune réelle décision ne soit encore prise par l’état français.
Terminons sur un extrait de l’article « Qu’en est-il du débat sur la restitution des œuvres africaines ? » : « Selon le président du quai Branly, vider les musées européens, qui constituent le patrimoine de l’humanité, ne serait pas la meilleure option. Il ajoute qu’il est du chef des principaux concernés, les africains, de décider de cette restitution et non celui de l’état français. »
Source photo : afrique.lalibre.be